Le mot compassion (comme le mot amour et beaucoup d’autres de ce genre dans nos sociétés actuelles, ayant été usés jusqu’à la corde ou avec des intentions qui sont parfois, pour le moins, douteuses) est difficile à entendre d’une oreille dégagée. Nous le comprenons souvent à partir d’interprétations de deuxième main et son sens véritable nous reste occulte.
Dans la tradition bouddhique, néanmoins, il pointe vers cet état d’être qui n’est pas séparé du monde ni des autres, de leur souffrance, et qui (co)m(patie), qui aspire du fond du cœur à ce que leur douleur s’arrête (parce que la douleur du monde est en même temps la nôtre).
La compassion selon cette perspective ne veut pas dire, en aucun cas, s’apitoyer sur quelqu’un d’autre ni non plus le fait de s’arroger le devoir noble de lui venir en aide parce qu’il serait moindre que nous, parce qu’il aurait moins de quelque chose dont nous, au contraire, serions garnis en abondance.
Elle n’est pas non plus la volonté de complaire ou de rassurer à tout prix sous prétexte de ne pas se montrer trop abrupte (ce que des grands maîtres spirituels comme Georges Gurdjieff ou Chogyam Trungpa ont nommé compassion idiote). Si, par exemple, on voit un enfant qui s’apprête à mettre les doigts dans la prise électrique ou qui commence à traverser une rue sans regarder si des voitures approchent, on ne dira pas que c’est trop abrupt ou déconsidéré d’empêcher cet
enfant d’aller plus loin dans son action, même si cela suppose qu’on agit brusquement. Cela est du au fait que nous savons que le fondement de ce geste abrupte est amour et compassion.
La compassion c’est donc, au contraire : chercher à offrir à l’autre ce dont il a véritablement besoin pour être.
La Pratique de la compassion ou Tonglen vient de la tradition bouddhique et veut dire, étymologiquement, donner et recevoir (tong-len) : en prenant une posture droite et en nous servant de la respiration comme point d’appui, nous donnons mentalement ce que nous considérons bon et précieux et prenons à nos frais ce que d’ordinaire on aurait tendance à rejeter, ce que nous trouvons repoussant.
Cette manière d’inverser la vapeur de notre manière habituelle de nous rapporter au monde est d’une énorme puissance de transformation. C’est néanmoins préférable d’avoir pratiqué un certain temps la Pratique de la présence attentive, la Pratique du courage et la Pratique de la Bienveillance aimante avant de s’adonner à la Pratique de la compassion, sans quoi on risquerait de mécomprendre expérientiellement son sens.
Pour cela, le Centre Gandhara organise régulièrement des stages ou la Pratique de la compassion est transmise de manière simple et rigoureuse aux personnes ayant reçu les pratiques précédentes.